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Entrée Zéro : Le Retour à la Source

Après des années à nourrir le bruit numérique, j'ai rencontré deux hommes sans téléphone : l'un qui a bâti la Silicon Valley, l'autre qui vit au Maroc. Leur gravité commune a révélé ce que j'ignorais : le signal vit dans la présence, pas dans les fils d'actualité.

·5 min de lecture
Entrée Zéro : Le Retour à la Source

J'ai passé des années à croire que ma présence publique était un carburant. Une façon de semer de nouvelles idées ; de lancer de nouveaux produits ; de maintenir un signal vivant dans le bruit. Mais la vérité est plus simple et plus lourde :

Le signal ne vit pas sur le fil d'actualité. Il vit chez les personnes qui apparaissent quand on s'y attend le moins.

Hier, lors d'un petit dîner, j'ai rencontré M. M. Un homme qui a bâti l'une des premières entreprises de microprocesseurs de la Silicon Valley. Un homme qui a façonné le substrat du monde numérique. Un homme qui détient tranquillement l'histoire de toute notre époque dans ses paumes.

Et il n'a pas de téléphone.

Non pas parce qu'il est déconnecté, mais parce qu'il est présent. Parce qu'il n'a jamais confondu portée et relation. Parce qu'il a contribué à concevoir le média, tout en refusant sa couche addictive. Parce qu'il sait que la découverte se produit en temps réel, pas en temps de fil.

Et quelque chose dans cela a touché un endroit en moi que j'ignorais.

Deux Hommes, Deux Mondes, Même Gravité

Mon père, au Maroc, n'a pas de téléphone non plus. Non par principe ; non par critique ; mais par instinct. Il rejoint le monde quand il le veut ; pas quand celui-ci l'appelle.

Deux hommes. Deux mondes. Même gravité.

Et dans leur absence du bruit numérique, j'ai vu ma propre fatigue avec une clarté parfaite.

Des années à publier dans le vide. Des années à essayer de « rester visible » au cas où j'en aurais besoin. Des années à regarder le Web –cosmique, sacré, informationnel– se diluer par des micro-gouttes de présence performative.

Je continuais à me présenter au concert. Mais les personnes que je devais rencontrer étaient au café de la librairie.

Le Seuil

Voici donc l'Entrée Zéro. Le seuil. Le vrai début.

Je retourne à la source : la cuisine, le jardin, la bibliothèque, l'atelier silencieux de l'esprit. Les lieux où la gravité fonctionne encore. Les lieux où les rencontres fortuites peuvent encore se produire. Les lieux où l'information a du poids, et où la présence humaine n'est pas une métrique.

J'archive mes comptes de réseaux sociaux. Non comme une sortie. Comme une réinitialisation.

Le blog restera. Un petit marché de quartier dans une rue tranquille. Si quelque chose que j'écris doit vous atteindre, il le fera. Pas besoin de pousser ; seulement de tirer.

Quand la Portée Est Devenue l'Objectif

Rétrospectivement, je peux retracer le moment où l'inversion s'est produite.

J'écrivais pour penser. Le blog était un atelier où les idées se raffinaient par l'articulation. La publication était secondaire au processus d'affûtage de la pensée par la prose.

Puis vinrent les plateformes. Les métriques. Les analyses d'engagement.

Lentement, invisiblement, l'écriture est devenue performance. La pensée est devenue contenu. La présence est devenue portée.

L'addiction était subtile parce qu'elle était récursive : vous publiez pour rester visible, la visibilité crée des opportunités, les opportunités valident la publication, la validation renforce le comportement.

Mais si les opportunités que vous optimisez ne sont pas celles qui comptent ?

M. M. n'avait pas besoin de Twitter pour construire des relations avec les personnes qui ont façonné l'histoire de l'informatique. Mon père n'a pas besoin d'Instagram pour maintenir des liens profonds avec sa famille et sa communauté. Tous deux opèrent selon une économie différente—une économie où l'attention est abondante précisément parce qu'elle n'est pas fragmentée entre les fils.

Le Vrai Coût

La présence performative a un coût au-delà du temps :

Elle vous entraîne à penser en pensées de longueur de tweet. Elle vous conditionne à optimiser pour la viralité plutôt que la profondeur. Elle vous fait éditer vos idées avant qu'elles ne soient complètement formées, en ponçant les arêtes qui pourraient ne pas « atterrir ».

Pire, elle vous fait confondre visibilité et impact.

Les métriques mentent. Un post avec 10 000 impressions qui ne génère aucune conversation significative a moins d'impact qu'un seul échange à table qui change la façon dont quelqu'un voit son travail.

J'ai déjà écrit à ce sujet—comment nous nous comprimons dans des rôles lisibles pour survivre aux flux algorithmiques. Mais connaître la dynamique et s'en libérer sont des entreprises différentes.

Ce Qui Reste

Le blog demeure. La newsletter continue. Le travail persiste.

Ce n'est pas une retraite de la pensée publique—c'est un retour aux conditions qui rendent la pensée possible.

Au lieu de diffuser vers un public imaginé à travers les plateformes, j'écrirai pour quiconque trouve son chemin ici. Au lieu d'optimiser pour l'engagement, j'optimiserai pour la clarté et la profondeur. Au lieu de nourrir le fil d'actualité, je cultiverai le jardin.

Si vous lisez ceci, vous avez déjà fait le choix de chercher le signal plutôt que le bruit. Vous avez navigué ici par intention, pas par suggestion algorithmique. Cela change la nature de notre échange.

L'Invitation

C'est l'Entrée Zéro parce que c'est le début d'un type différent de présence.

Pas invisible—présent. Pas déconnecté—sélectif. Pas silencieux—délibéré.

J'en ai fini de confondre portée et résonance. Fini de confondre visibilité et vitalité. Fini de me présenter là où la gravité ne fonctionne plus. Brisée, même.

Le travail continue. Simplement plus près de la source.

Si quelque chose que j'écris doit vous atteindre, il le fera. Pas besoin de pousser ; seulement de tirer. Comme cela fonctionnait avant que les fils ne nous apprennent à oublier.


Le blog demeure. Le fil d'actualité, non. Si vous voulez suivre, abonnez-vous à la newsletter ou revenez quand vous en avez envie. Le RSS est aussi une option. Sinon, je vous verrai en personne, là où vit le vrai signal.

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À propos de l’auteur

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Zak El Fassi

Engineer-philosopher · Systems gardener · Digital consciousness architect

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